Selon Air Rhône-Alpes, Annecy a été en 2016 la ville la plus polluée de la région aux particules fines cancérigènes PM2,5. Or, Annecy n’a toujours pas de Plan de Protection de l’Atmosphère. Pire, les projets routiers se multiplient dans l’agglomération.
En 2016, Annecy a été la ville la plus polluée de Rhône-Alpes aux PM2,5, à égalité avec Passy dans la vallée de l’Arve, et devant Lyon, Chambéry et Grenoble. Elle l’est pour la troisième année consécutive, et également en moyenne sur la période 2009-2016. Pour rappel Annecy a été classée 2ème ville la plus polluée de France aux PM2,5 par l’OMS (classement publié en 2014 sur des données de 2011). Sur un autre critère, celui de l’indice ATMO (SO2, NO2, O3, PM10), une étude publiée sur le site du Ministère de l’Environnement place Annecy à la 8e place sur les 60 agglomérations françaises de plus de 100.000 habitants (période 2009-2011).
L’Institut de Veille Sanitaire (InVS) nous informe sur le fait que dans l’agglomération annécienne, les habitants perdent 11 mois d’espérance de vie par rapport à une ville qui respecterait la valeur-guide de l’OMS pour les particules fines cancérigènes PM2,5 ; soixante-dix décès par an y sont attribués à cette pollution de fond.
Le bassin annécien fait partie de la Zone Urbaine de Rhône-Alpes, qui est concernée par le contentieux européen sur la qualité de l’air. Alors que la France se couvre de Plans de Protection de l’Atmosphère (PPA), Annecy n’a toujours pas de plan de lutte contre la pollution. On peut lire dans le rapport de la Cour des comptes de décembre 2015 "Les politiques publiques de lutte contre la pollution de l’air" :
« Des agglomérations comme Annecy, Annemasse et Chambéry, situées dans la zone urbaine Rhône-Alpes faisant actuellement l’objet du contentieux européen, ne sont pas non plus couvertes [par un PPA]. Air Rhône-Alpes a réalisé les diagnostics relatifs à la qualité de l’air dans ces trois zones et un travail d’élaboration de mesures à mettre en œuvre y a été initié courant 2011. Chambéry et Annecy pourraient disposer d’ici fin 2015 d’un plan local pour la qualité de l’air, outil ne contenant aucune mesure réglementaire contraignante. La réticence de certains responsables à s’engager sur des mesures de lutte contre la pollution de l’air est réelle : l’absence de plan dans de nombreuses agglomérations en est un indicateur. »
Pire, le 27 juin 2016, le Conseil départemental de la Haute-Savoie (CD74) et la Communauté de l’agglomération d’Annecy (C2A), ont signé une convention de financement global à hauteur de 432 millions d’euros pour les neuf projets routiers programmés dans l’agglomération. Ces neuf projets ont pour objectif, selon le CD74 et la C2A, de « réduire la pollution et préserver l’environnement » (sic), ainsi que de « développer les transports collectifs », alors que ceux-ci n’ont droit qu’à la portion congrue, la quasi-totalité des projets étant dédiés au développement des routes, favorisant ainsi les voitures individuelles. Par ailleurs, certains de ces projets forment un ensemble continu d’extensions du réseau routier (tunnel sous le Semnoz, doublement du contournement d’Annecy – RD3508 –, en lien avec l’élargissement à 2X3 voies de l’autoroute A41 nord) pour lesquels il ne semble pas prévu d’étude d’impact globale.
Déjà en 2014, une étude publiée sur le site du Ministère de l’Environnement (« Entreprises et mobilité durable en territoires périurbains. Le cas du bassin annécien », Cerema et LET), constatait : « Pour se déplacer, les habitants du bassin annécien utilisent presque exclusivement la voiture. Cette forte dépendance à l’automobile s’explique à la fois par la qualité de l’offre routière et par la faiblesse de l’offre en transports alternatifs au sein du bassin annécien. »
La Haute-Savoie en général est un département atypique par son taux de motorisation : il a été classé quatrième département français sur le critère du nombre de voitures par habitant, après l’Oise (base des locations de voitures) et les deux départements de Corse. Ce classement se base sur des données un peu datées (2002-2006), mais il serait surprenant qu’il se soit amélioré depuis au vu des politiques menées par les élus locaux, atypiques elles aussi puisque encore et toujours de manière quasi-exclusive en faveur de l’automobile.
Ce qui se passe ici en Haute-Savoie est en contradiction totale avec les objectifs du SCoT (« réduction de l’usage de la voiture par report sur des transports en commun attractifs »), ceux du Plan Climat Energie Territorial (« réduction des émissions de Gaz à Effet de Serre – GES »), de l’engagement TEPOS signé le 20/08/2015 par la Ministre de l’Environnement en présence du Président de la République (« réduction des GES et diminution des transports individuels, notamment en zone péri-urbaine »), des engagements internationaux de la COP 21 et de l’Europe.
Ce qui se passe ici est également en contradiction avec la Convention Alpine, traite signé par la France, où l’on peut lire : « Des projets routiers à grand débit pour le trafic intra-alpin peuvent être réalisés, si [...] les besoins en matière de transports ne peuvent être satisfaits [...] par l’extension ou la construction d’infrastructures ferroviaires [...] et si les résultats apportés par l’étude d’opportunité ont montré [...] que le résultat de l’étude d’impact sur l’environnement est positif. » Or, en ce qui concerne le projet de tunnel sous le Semnoz :
- les besoins en matière de transport sur la rive gauche du lac d’Annecy peuvent être satisfaits par la construction d’infrastructures ferroviaires (par exemple le tramway conseillé par l’étude TTK)
- aucune étude d’impact sur l’environnement n’a encore été faite mais cet impact serait certainement négatif en terme de pollution et d’émissions de GES : l’étude BG montre que le tunnel sous le Semnoz génèrerait 48% de trafic supplémentaire en heure de pointe du matin.
En octobre 2015, près de 40 associations du département ont fait aux conseillers départementaux, députés et sénateurs de Haute-Savoie une demande de moratoire sur les projets d’extension des capacités routières de notre département, sans réponse à ce jour.
Par ailleurs, la France s’est engagée à contenir le réchauffement climatique bien en deçà de 2 degrés et à s’efforcer de le limiter à 1,5 degré. Cet objectif ne sera jamais atteint si on laisse des territoires prendre des décisions qui lui sont totalement contradictoires.
Nous demandons au préfet la mise en place d’un véritable Plan de Protection de l’Atmosphère et l’évaluation des conséquences sur la qualité de l’air des nombreux projets routiers.
Nous demandons aux élus l’arrêt de la politique du tout routier et la mise en place de transports en commun véritablement attractifs.